Monique Radenac livre à travers cette exposition un nouvel aspect d’un chemin qu’elle explore avec instinct depuis ses premières toiles.
Dans cette dernière période, la tension des lignes s’estompe, au profit des harmonies de couleurs qui dessinent une harmonie musicale, au gré des paysages et des jardins qu’elle décline.
Sur les nappes d’une pelouse de couleur lisse s’égrènent des arbres dont les troncs dansants portent un lourd feuillage bruissant de tonalités subtiles. Il y en a de bleus, de verts et de jaunes, des beiges et encore d’autres, traités en larges aplats.
Le vent s’y entend, les couleurs semblent naître d’elles-mêmes, s’imposent avec la douceur d’une évidence, apparaissent sur la toile ainsi que des bulles d’air remontant à la surface de l’eau, s’envahissent et se pénètrent en des camaïeux imperceptiblement construits.
Difficile d’imaginer ces toiles encagées dans un cadre : Les couleurs y ondoient de leur propre gré et ne cessent de s’étendre. On s’étonnerait presque de ne pas pouvoir suivre leurs métamorphoses sur les murs qui les environnent.
On est loin de la photographie d’un paysage figé, mais bien au cœur d’un monde qui continue de vivre et de vibrer.
Il est des toiles qui se projettent hors de leur enclos, qui s’emparent de l’oeil du spectateur et lui imposent leur émotion. En vérité, ici c’est le contraire. Vous voilà aspiré, insensiblement.
C’est un univers dépouillé, désert, où rien ne nous est connu, mais où tout reste étrangement familier.
Comme un de ces rêves, dont on garde un souvenir confus au matin.
Ces jardins peints par Monique Radenac ravivent certaines des peurs de l’enfance, où, le nez pointé au bas des arbres si grands, si hauts, traversés par les chants inconnus des feuilles et du vent, on s’interroge.
Ici les couleurs sont le seul langage, le seul repère, au milieu d’une œuvre qui ne conserve que quelques traits figuratifs…lointains souvenirs. Seule l’émotion nous guide.
« Petit poucet, rêveur, on rime au milieu des ombres fantastiques »…
Monique Radenac sait ainsi dévoiler les paysages d’une rêverie intime, singulière.
Pourtant, l’artiste demeure toujours présente, et sa maîtrise : le métier est là, solide, construit. La matière, traitée avec vérité. La poésie n’autorise jamais le trop fameux « flou artistique » !
….Voici la trompeuse harmonie d’une toile brisée par la brusque touche d’une couleur vive, d’une balafre vermillon ou d’un ton dur, posés, toujours avec autorité et justesse… Ils viennent ordonner la composition, affirmant son rythme musical.
Monique Radenac a su prendre chez les classiques ce goût rare d’une certaine pureté dans les lignes, d’un dépouillement dans la composition, de la clarté. Sa vision dénude ces jardins du Sud, dévoile la vérité de leur lumière.
Et tout se met en marche.
Peter Brook disait que le rythme est le point commun de tous les arts.
Certes. La scansion, l’ordonnancement, la couleur, l’humeur, la composition, sont choses relativement faciles à décrire. Mais Peter Brook se garde bien de révéler le secret de l’essentiel…car il est indicible. Précisément.
Monique Radenac nous offre aujourd’hui une série de toiles qui témoigne de ce mystère. »
Niccolo Rigutto
Niccolo Rigutto :
Niccolo Rigutto est musicien, metteur en scène et critique d’art.
D’origine italienne, il a voyagé en Grèce et au Moyen-Orient, avant de se fixer en France.
Titulaire d’un Master en Histoire de l’Art à la Sorbonne, il exerce son activité de pianiste classique et de metteur en scène de théâtre à Paris.
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